VAUD (CANTON DE)

VAUD (CANTON DE)

VAUD CANTON DE

Le pays de Vaud (3 212 km²) est, avec 593 000 habitants selon les estimations de 1992, le plus peuplé des cantons suisses de langue française. Celui aussi dont le territoire est le seul — avec Berne — à s’étendre sur les trois grandes régions naturelles de la Confédération. Les Grandes Alpes vaudoises comprennent un fragment de l’édifice complexe des nappes charriées, culminant à la dent de Morcles (2 980 m), au-dessus du coude du Rhône, et dans le massif des Diablerets (3 222 m). En avant, les Préalpes calcaires sont formées d’une série de plis, d’une altitude moyenne de 2 000 mètres, s’élevant graduellement vers l’est, des Pléiades aux Rochers de Naye et aux Tours d’Aï. Le relief de ces montagnes humides et fraîches, très enneigées, a été disséqué par un réseau de vallées tributaires du Rhône et de la Sarine. Elles ménagent souvent des replats étagés, favorables au peuplement, comme celui de Leysin, dans la vallée des Ormonts (Grande-Eau). La région la plus individualisée est le Pays d’En-Haut, bassin de la moyenne Sarine, clos de défilés à l’amont et à l’aval et qui ne communique avec le reste du canton que par quelques passages (col de Jaman, col des Mosses, 1 445 m). Le Moyen Pays est une zone déprimée, à la topographie bosselée de collines, incisée de ravins taillés dans la mollasse tertiaire, surmontée des dépôts fluvio-glaciaires du Quaternaire. À l’ouest, le Plateau s’adosse au Jura par un talus, atteignant 800 mètres et tombant sur le Léman par l’adret ensoleillé de la Côte. Le centre est occupé par un sillon, souvent encaissé en canyons, entre les lacs de Genève et de Neuchâtel, par les vallées de la Venoge et de l’Orbe. C’est l’axe fondamental des communications vaudoises avec le reste de la Suisse. Au levant, le plateau vaudois, plus proche des Alpes, a été relevé jusqu’à 1 084 mètres (mont Pèlerin). Il a la forme d’une table, inclinée vers le nord-est, dans le Gros de Vaud, où sinue l’ample vallée alluviale de la Broye, aux sols fertiles, et il surplombe le Léman par le revers escarpé de Lavaux. L’opposition est nette entre l’intérieur, déjà rude, et la Riviera lémanique, au microclimat d’abri propice à la vigne. Le Jura vaudois est la section la plus étroite et la plus haute de la partie suisse de la chaîne. Il s’allonge en deux anticlinaux parallèles, dont le plus relevé domine le Plateau, de la Dôle (1 683 m) au mont Tendre. Il est relayé, à l’arrière, par la chaîne du Risoux. Entre les deux plis est enfermée, à plus de 1 000 mètres, la vallée de Joux, cours supérieur de l’Orbe. Sur le flanc du Chasseral (1 611 m), le val de Sainte-Croix est plus élevé encore. Le Jura est une barrière difficile, franchie par quelques cols, comme le passage de Saint-Cergue (1 233 mètres). Humide et froid, couvert de forêts, c’est, à altitude égale, un milieu naturel beaucoup plus sévère que celui des Alpes.

Le pays de Vaud a connu les étapes classiques du peuplement de la Suisse sud-occidentale, avec les hommes préhistoriques du Néolithique, les cités lacustres de l’âge du bronze, les Celtes de l’âge du fer. À partir de \VAUD (CANTON DE) 58, la romanisation, puis la christianisation transformèrent la région en une marche, occupée par les vétérans de la Colonia equestris , autour des cités d’Ebrodunum (Nyon) et, surtout, d’Aventicum (Avenches). Ravagé par les invasions, dès le milieu du III^e siècle, le pays de Vaud passe, dans la seconde moitié du V^e siècle, sous la domination burgonde. Intégré aux royaumes des Mérovingiens, puis des Carolingiens, il est cité, en 756, sous le nom de Pagus Waldensis. À la mort de Rodolphe III (1032), dernier roi de Bourgogne, la région est rattachée à l’Empire, mais elle se morcelle en une série de féodalités. Les comtes de Savoie, qui ont pris pied dans la contrée, dès le XI^e siècle, évincent les Zähringen et leurs successeurs, et deviennent les maîtres de l’ensemble du territoire vaudois. À deux reprises (1285-1349 et 1465-1476), la baronnie de Vaud est érigée en apanage, pour des membres de la branche cadette de la dynastie. Les guerres de Bourgogne ravagent les campagnes et marquent les premiers empiétements des Bernois et des Fribourgeois. Les deux cantons se partagent les terres d’Orbe, Echallens et Morat; Berne, seule, prend la partie orientale (Bex, Aigle). De janvier à mars 1536, tout le pays de Vaud est conquis par Berne. Jusqu’en 1798, les Vaudois, à qui les vainqueurs ont imposé la Réforme protestante — sauf dans six paroisses des environs d’Echallens — sont un peuple-sujet, gouverné par des baillis. Cette tutelle s’appesantit dans la seconde moitié du XVIII^e siècle. Elle provoque, en 1723, la tentative de révolte du major Davel, qui échoue, suivie, en 1790 et 1791, d’autres séditions, également réprimées. L’intervention du Directoire en Suisse est suivie d’un soulèvement général (24 janv. 1798) et de la proclamation de l’indépendance. L’éphémère République lémanique se mue en un canton du Léman, intégré à la République helvétique. Unitaires et fédéralistes s’y opposent violemment, jusqu’à ce que l’Acte de médiation (1803) donne au pays le statut de canton indépendant. Le Congrès de Vienne sanctionne cette autonomie. Le XIX^e siècle fut occupé par des luttes entre conservateurs et libéraux. Ces derniers imposent la Constitution de 1831, mais ils sont, à leur tour, renversés par la révolution radicale de février 1845, qui élabore une constitution démocratique. Les radicaux ont dominé la scène politique jusqu’au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. L’histoire a légué au canton ses frontières au dessin tourmenté, semées d’enclaves genevoises (Céligny, Coudres), fribourgeoises (Surpierre, Vuissens, Estavayer), et incluant le district d’Avenches à l’intérieur du canton de Fribourg.

L’économie vaudoise demeure équilibrée. Elle a été longtemps marquée par la prépondérance agricole, autour de villes-marchés qui ont commencé à s’industrialiser avec la houille blanche. Le secteur primaire comporte, dans les Alpes, une vie pastorale vouée à l’élevage laitier. Le Plateau est une terre de polyculture; les exploitations familiales pratiquent l’élevage bovin, nourri de plantes fourragères, mais gardent du blé et, dans la vallée de la Broye, des cultures industrielles (tabac, légumes). La vigne, présente sur les rives du lac de Neuchâtel et dans la vallée de l’Orbe, prend sa majeure extension dans la zone lémanique. Le vignoble est découpé en «parchets», petites parcelles soutenues par des murs, et le canton est un gros producteur de vin blanc. L’industrie peut compter sur quelques matières premières (salines de Bex), mais elle reste fortement liée à l’agriculture avec les minoteries, les pâtes alimentaires, le chocolat et les produits laitiers. Il s’y ajoute de la mécanique de précision (horlogerie) et des industries chimiques. Le tertiaire exprime l’activité administrative et commerciale d’un gros canton, et la vocation touristique. Dans ce dernier secteur, la région lémanique arrive en tête, avec le climatisme de la Riviera. Les villes sont à la fois commerciales, administratives et industrielles. L’urbanisation détermine deux grands ensembles: le ruban côtier du Léman, de Nyon (12 800 habitants en 1990), Morges (13 000), Prilly (11 900), à Vevey (16 100) et Montreux (19 700), par la zone urbaine de Lausanne, qui dépasse 230 000 personnes (123 150 pour la ville de Lausanne en 1992), et le pôle septentrional d’Yverdon (20 800 hab.).

Encyclopédie Universelle. 2012.